Ce spectacle monté par Catherine Dorion auquel j'ai assisté pendant mon marathon d'écriture m'a vraiment percutée. Cette femme a littéralement réussi son coup, dans mon cas, en faisant ressortir mes émotions à la surface.
Illustration: Pierre Bouchard
J’ai pris part à une conférence qu’elle donnait à mon cégep, et elle disait que les gens, de nos jours, cachent leurs émotions enfouies en eux. Ils ne se permettent pas de les vivre, de les montrer. Est-ce synonyme de faiblesse? Depuis toujours nous apprenons à ne pas pleurer. Alors que c’est bien de tout faire sortir une fois de temps en temps.
De plus, la société actuelle est stressée, anxieuse. Est-ce à cause de nos émotions refoulées? Catherine Dorion pense que nous avons deux sortes d’intelligence. La rationnelle et celle de nos émotions, notre « magma », comme elle aime l’appeler. Et c’est à celui-ci qu’elle s’adresse lorsqu’elle crée quelque chose. Pour nous libérer, nous faire prendre conscience des choses et laisser de côté notre rationalité un instant. Elle croit que nous avons besoin de ces deux intelligences. Par contre, celle du magma n’est guère assez utilisée.
Aussi, elle veut faire prendre conscience que notre culture est belle et que nous la perdons, que les Québécois ne sont plus tels qu’ils étaient et qu’il ne faut pas oublier qui nous sommes. Nous venons des premières nations, de la terre. Nous étions bien rien qu’à sentir le vent dans nos cheveux, écouter les oiseaux chanter et à respirer le parfum de la forêt. Nous vivions de musique, de famille, de francophonie.
Même si dans la pièce je me retrouvais dans le noir, entourée d’une trentaine de personnes, je me sentais seule. Je me sentais connectée avec moi-même. Privée du sens de la vue et du toucher, je me sentais vulnérable, mais plus à l’écoute. Qui de nos jours écoute vraiment? Mais réellement? Tous les sons utilisés, les odeurs, nous amènent dans une transe magique et magnifique dans laquelle tu ne peux sortir. Tu réfléchis vraiment beaucoup, mais à la fois, tellement tu captes de l’information, on dirait que tu ne comprends rien. Et sans savoir la raison, je me suis mise à pleurer.
Pleurer de tristesse, de joie, de mélancolie? Je ne sais pas. Mais je sais que Catherine Dorion a su toucher mon magma à moi. Au milieu de tous ces gens je me suis livrée aux larmes. Ce que, normalement, je n’aurais sûrement pas fait. Quel spectacle de génie! Nous confronter à nous-mêmes en nous privant de quelques sens, en n'en accentuant d’autres, pour ainsi faire réfléchir les gens d’une autre façon.
Ce brouhaha d’idées, de sons, d’odeurs amène un désordre qui nous fait voir à quel point notre société est chamboulée et stressée. C’est un problème collectif qu’il faut guérir en se rappelant nos origines et en prenant conscience du problème. Il faut combiner nos deux intelligences, se donner le droit de livrer nos émotions, de les ressentir, faire sortir le magma, pour s’aider tous et chacun à vivre mieux. Soignons-nous collectivement, nous, les Québécois.